Huile sur panneau de peuplier, h. 63 cm, l. 49 cm
Important cadre italien d’époque XVIIème siècle en bois doré et peint, richement sculpté de feuillages.
Encadré : h. 94 cm, l. 79 cm
Notre panneau présente la Vierge et Jésus dans une mise en scène émouvante et intimiste, le clair-obscur accentuant une atmosphère mystique de cet acte d’allaitement qui forme un lien entre la mère et son enfant.
Le visage de la vierge au type léonardesque est dominé par un front haut, les yeux étirés aux lourdes paupières baissées et le long nez. Ses traits sont modelés grâce à la technique de sfumato, les transitions subtiles de l'ombre à la lumière, floutant le contour de sa joue droite et accentuant les zones sombres sous les yeux. Sous cet effet les carnations éclairées semblent illuminées d’un rayonnement intérieur.
Les cheveux détachés séparés par une raie médiane, les mèches bouclées soigneusement dessinées émergent de l’obscurité et retombent de chaque côté sur ses épaules.
La Vierge porte une robe d'un rouge vif, surmontée d'un manteau bleu assombri par le temps, doublé d'un orange intense qui encadre son visage et apporte une touche de couleur en bas à droite du tableau, autour de sa manche. Les couleurs éclatantes et les chaires illuminées contrastent avec le fond sombre.
Jésus se tient sur le genou de la vierge, partiellement couvert d’un voile transparent, il appuie son visage contre le sein découvert de sa mère, qu'il tient de ses deux mains pour têter.
La posture de Marie grave et solennelle affecte cet acte nourricier pleine d’amour et de douceur et préfigure le futur sacrifice du Christ pour sauver l’ensemble de l’humanité du péché.
Notre émouvant tableau est une variante d’atelier d’après l’œuvre autographe de Giovanni Pietro Rizzoli, dit Giampietrino peint dans les années 1520 et conservée dans une collection privée. L'artiste est consideré comme l'un des plus talentueux disciples de Léonard de Vinci à Milan.
Plusieurs répliques sont répertoriées par les historiens de l’art, elles diffèrent de la version originale par la nudité complète de Jésus ou au contraire par la présence d’un drap qui l’enveloppe partiellement. En revanche sur notre tableau l’élève de l’artiste reprend fidèlement le même voile transparent qui se trouve sur l’original.
L’œuvre autographe de Giampietrino :
• Huile sur panneau, 66,5 cm x 51,7 cm, Christie’s, 2/07/2024, lot n 12 https://www.christies.com/en/lot/lot-6490837
Œuvres en rapport :
• D’apres Giampietrino, XVIème siècle, huile sur toile 56 cm x 46 cm, Musée des Beaux-Arts de Dijon, inv. Ca 735 (l’enfant nu)
https://agorha.inha.fr/ark:/54721/4d276630-d1e5-4093-92f5-92d3df8a8402
• Paris, hotel Georges V, 18/12/2002, lot n° 2, attribué à Giampietrino, huile sur panneau de noyer, 67 cm x 52 cm (commentaire : l’enfant habillé)
https://rkd.nl/imageslite/1501679
• Milan, vente Galerie Scopinich, novembre 1932, lot n 39, huile sur panneau, 66 cm x 51 cm, comme maitre flamand de l’école milanaise de Leonardo, vers 1510, collection Claudio Gallio (l’enfant nu)
https://rkd.nl/imageslite/17837
• Vente Christies New York, 19/04/2007, lot n 248, huile sur panneau ; 63,5 cm x 50,2 cm, comme cercle d’Andrea Solario (Milan 1465-1524) (commentaire : l’enfant habillé)
• Vente Nagel, Stuttgart, Allemagne, 30/11/1965, huile sur panneau, 48 cm x 37 cm, comme école milanaise du XVIème siècle, (commentaire : l’enfant habillé)
https://rkd.nl/imageslite/1439525
Bibliographie : C. Geddo, « La Madone de Castel Vitoni del Giampietrino », Achademia Leonardi Vinci , VII, 1994, p. 62, note 29 pour les répliques recensées
Le thème de la Vierge allaitant l’Enfant Jésus, la Virgo lactans, est l’un des plus anciens et vénérés de l’iconographie chrétienne. En Italie, cette image s’est développée à partir de la seconde moitié du XIVe siècle. Andrea Solario a pu en voir différents exemples en Lombardie comme en Vénétie où il vécut durant sa jeunesse. A Milan, dans le sillage de Léonard de Vinci, plusieurs artistes cherchent à trouver une interaction vivante et naturelle entre la mère et l’enfant, avec une expression tendre. La Madone Litta de l’Ermitage en est le modèle, une composition probablement conçue par Léonard de Vinci mais peinte par l’un de ses élèves, probablement Marco d’Oggiono, au début des années 1490 (attribué à Léonard de Vinci, Vierge allaitant l’Enfant, dite Madonna Litta, vers 1490-92, bois transposé sur toile, 42 x 33 cm, Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage, GE249 ).
Giovanni Pietro Rizzoli, dit Giampietrino (actif Milan 1495-1550)
De nombreux doutes subsistent quant à la personnalité de Giampietrino, mais il semble probable qu'il s'agisse de Giovanni Pietro Rizzoli. Il pourrait être identifiable avec le « Gianpetro » répertorié avec d'autres noms annotés par Léonard sur une feuille de son célèbre traité de peinture, le Codex Atlanticus. Giovanni Paolo Lomazzo, dans son traité de peinture publié en 1584, cite un certain « Pietro Rizzo milanese » parmi les élèves les plus célèbres de Léonard. Dans sa jeunesse, il a peut-être été formé dans l'atelier de Léonard dès le milieu des années 1490. Alors que le jeune apprenti devenait un peintre plus mature, il aurait été naturel pour eux de renouer leur relation de travail une dizaine d'années plus tard, lorsque Léonard retourna à Milan pour la deuxième fois entre 1508 et 1513. Que Giampietrino ait eu accès à Léonard et à ses matériaux, dessins et peintures dont il pouvait s'inspirer est attesté par les œuvres elles-mêmes. Parmi les Leonardeschi, Giampietrino fut l'un des élèves les plus doués et un grand diffuseur du style du maître dans toute la Lombardie, grâce à sa production abondante, quoique inégale, puisqu'il réalisa de nombreuses versions d'une même œuvre avec la participation de l'atelier.