Coffret à jeux en ivoire et ébène, Augsbourg, vers 1630, Atelier d’U. Baumgartner

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Cet extraordinaire coffret de jeux que nous présentons est un exemplaire rare témoignant d’un niveau exceptionnel de savoir-faire atteint par des ébénistes d’Augsbourg. Il est aussi un reflet de la vie des cours princières allemandes connues pour leur luxe et raffinement hors du commun associés à l’essor des Kunstkammer (cabinets de curiosité)

Les jeux de société, occupation digne des princes, entraînent l’engouement pour les boites à jeux et les rendent indispensables aux cabinets de curiosités.

De forme rectangulaire, notre coffret permettait de jouer aux dames, échecs, jeu de marelle, et une fois ouvert au backgammon. Fermé il pouvait contenir à l’intérieur des pions et des accessoires.

En marqueterie d’ébène et d’ivoire gravé, son décor riche et précieux est le résultat d’une collaboration entre un ébéniste et un graveur sur ivoire et ébène.

Le couvercle présente sur un côté le jeu de marelle en forme de losange, orné au centre 

d’un médaillon en ivoire illustrant les deux joueurs de backgammon.

Les quatre triangles encadrant le jeu sont agrémentés d’une marqueterie à décor de singes placés au milieu des rinceaux, ces singes sont fortement inspirés d’un jeu de cartes gravé par Virgil Solis (Nuremberg, 1514-1562).

Le revers du coffret est occupé par un échiquier.

L'échiquier est décoré de carrés d'ivoire minutieusement gravés d'insectes qui ont sans doute été inspirés par les gravures de Joris Hoefnagel tirées de son ouvrage Archetypa Studiaque Patris publié en 1592. Le travail de J. Hoefnagel constitue une étape importante dans l’observation de la flore et de la faune dans une approche réaliste et assidue. Le livre a inspiré des nombreux peintres de natures mortes au XVIIème siècle.

Le soin et l’aspect méticuleux de la gravure, les ombres créées grâce aux hachures, les details des pattes et des ailes des insectes, permettent d’apprécier le talent et l’engagement de l’artiste-graveur, transformant un objet de divertissement en un objet à fort pouvoir didactique.

Notre œuvre traduit parfaitement l’esprit des cours princières allemandes, le luxe et le loisir allaient de pair avec la recherche scientifique et la contemplation de l’univers. Un prince se devait d’être érudit, instruit, mais également sensible au monde qu’il entoure. Le jeu d’échecs façonnait une des plus importantes qualités d’un souverain, la capacité d’être un fin stratège.

L’intérieur de notre coffret révèle un jeu de backgammon conçu en alternant les douze sections pyramidales en ivoire gravé aux ornements grotesques et les mascarons les séparant des sections d’ébène. Les parties centrales ainsi que les bordures sont ornées de marqueterie d’ivoire et ébène gravés de rinceaux feuillagés dissimulant des têtes d’animaux stylisées et des chiens poursuivant les lièvres. Ces scènes à l’intérieur du backgammon font allusion au jeu qui se transforme en chasse.

Les carrés d’ivoires gravés aux angles illustrent différentes variétés de fleurs, indiquant de l’intérêt porté pour la botanique.

Notre boite à jeux, appartient à un groupe d'œuvres attribuées à Ulrich Baumgartner et son atelier, le plus célèbre ébéniste d'Augsbourg du XVIIe siècle.

L’origine de notre coffret est d’autant plus attestée, qu’il porte l’estampille de la ville d’Augsbourg et de la guilde des maitres-ébénistes garantissant le bois d’ébène (la pomme de pin pour la ville d’Augsbourg, et EBEN pour le bois d’ébène).

Cette estampille devient obligatoire en 1625, nous pouvons situer la fabrication de notre coffret autour de cette date.

 

Augsbourg, vers 1630, atelier de Ulrich Baumgartner.

Très bel état de conservation.

Dimensions: h. 7,5 cm, l. fermé 38,5 cm, ouvert 77 cm, p. 44 cm

 

Ulrich Baumgartner (1580-1652)

Ulrich Baumgartner était spécialisé dans la fabrication de cabinets, de coffrets, boites à jeux et autres objets pour les Kunstkammer.

Il devient célèbre suite a la commande par un important marchand d’art Philippe Hainhofer (1578-1647) d’un cabinet d’art appelé le Pommerische Kunstschrank destiné au duc Philippe de Poméranie. Baumgartner livre le cabinet en 1617 muni de multiples accessoires, dont le plus fameux est le plateau de jeu d’échecs intégré.

Cet échiquier en bois d’ébène, et ivoire gravé est conservé aujourd’hui au Musée des Arts décoratifs de Berlin, le cabinet auquel il appartenait a été détruit.

Les coffrets de jeux similaires

Le décor gravé de notre échiquier se rapproche par son décor d’insectes à la boite à jeux de Philadelphia Museum of Art.

Ce même décor d’insectes est repris sur un échiquier provenant de la vente Christie’s, toutefois il s’agit de l’ébène gravé. Amsterdam, 20/11/2012, lot n 70.

Ces deux objets proviennent également de l’atelier d’Ulrich Baumgartner

Dans les musées :

Boite à jeux, GRASSI Museum of Applied Arts, Leipzig

Sur le marché de l’art :

Boite à jeux, collection Georges Laue, Munich

 

Les coffrets de jeux

Les jeux de société sont très fortement appréciés au XVIIème siecle. C’est le passe-temps favori des riches et des pauvres, des hommes et des femmes de toutes les cours d’Europe.

Les coffrets de jeux de société utilisés pour ce divertissement possèdent un rôle de représentation dans la haute société. La nécessité de s’entourer des objets de luxe au quotidien afin de faire valoir son statut pousse les riches et les puissants à acquérir des coffrets à jeux fabriqués avec des matériaux précieux et exotiques tels que l'ivoire, l'ambre, l'argent ou les bois rares. L’ivoire est d’ailleurs appelé « l’or blanc » à cette période. Quant au bois d’ébène, importé par Venise, tellement coûteux, qu’un document de cette époque nous renseigne que son emploi est destiné uniquement aux princes et nobles.

Kunstkammer (cabinet de curiosité)

Kunstkammer se définit comme un espace personnel dédié à la conservation et exposition de multiples collections constituées pour refléter le monde, autrement dit une ébauche des musées à venir.

Les cours princières allemandes du début du XVIIème siècle guidées par la curiosité et l’envie de découvrir et apprendre le monde rassemblent d’incroyables collections d’objets classés en plusieurs catégories : Naturalia (minéraux, animaux, végétaux), Artificialia (œuvres d’art), Scientifica (instruments scientifiques).

 

L’estampille EBEN

Suite à un conflit en 1588 opposant la guilde des tourneurs en bois et des ébénistes et visant à déterminer quelle guilde devait être responsable du tournage de l'ébène, la décision a été prise en faveur des ébénistes. Cependant durant les décennies suivantes, le bois d’ébène a connu un tel succès que certains artisans malhonnêtes ont utilisé du poirier noirci en le faisant passer pour l’ébène et trompant ainsi leur clientèle.

La guilde, responsable du contrôle de la qualité du travail de ses membres, a riposté en 1625 en introduisant l’inspection obligatoire par les grands maitres de la guilde de toute marchandise en bois d’ébène et l’authentification du bois validée par une estampille «EBEN» à côté de la «pomme de pin» d'Augsbourg

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